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mercredi 30 novembre 2016

« Nous élevons ces enfants avec des sacrifices »

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Tijen Horoz, membre de l’équipe de fundraising à MH: Son témoignage reporté d’Albanie ; une des régions où Muslim Hands œuvre en faveur des démunis cet hiver en distribuant une aide humanitaire vitale.

Lorsque nous entrons dans la cour d’un ensemble de bâtiments de la ville alpine de Kukes, je n’arrive pas à comprendre pourquoi nous nous arrêtons là. Quand Shkelzen, le Directeur de Muslim Hands Albanie, nous annonce que nous allons distribuer l’aide hivernale ici, je suis choquée d’apprendre que ce qui semble être à mes yeux les annexes d’une ferme et des hangars de stockage abandonnés, sont en réalité des logements familiaux.

Il neige abondamment et le vent est glacial. Je m’interroge sur le vent que les fenêtres cassées de ces maisons laissent entrer. Bientôt, de jeunes enfants apparaissent à quelques pas des embrasures des portes, souriant malicieusement et essuyant leurs nez qui coulent avec le dos de leurs mains. Pas une veste ni un manteau en vue. Les pulls tricotés par leurs mères sont tout ce qu’ils ont pour les protéger du froid.

Deux de ces enfants sont les fils de Rabia Cena, une des bénéficiaires recevant des couvertures chaudes et de la nourriture grâce à vos dons pour la campagne d’hiver. Rabia, mère de trois garçons, n’a que 38 ans, mais semble être bien plus âgée. Elle nous accueille chaleureusement et insiste pour que nous prenions le thé. Encore stupéfaite par l’extérieur de la maison, je me sens bouleversée une fois entrée à l’intérieur. La première chose qui me frappe est la température. J’avais espéré me mettre à l’abri du froid, mais il ne fait pas meilleur ici qu’à l’extérieur. Les murs sont envahis par l’humidité et la moisissure et le sol de pierre nu n’offre aucune isolation.
Juste en face de moi se dresse un escalier en bois de fortune menant à une pièce du deuxième étage qui n’est pas habitable. Les fenêtres cassées, l’absence de parquet, et un problème de fuites dans la toiture suggèrent que la seule utilité de la pièce est d’entreposer les maigres possessions de la famille. Cela implique que Rabia, son mari et leurs trois jeunes garçons vivent, dorment et mangent tous dans une seule pièce, chauffée par un poêle à bois. La famille coupe son propre bois pour alimenter le feu, ce qui est difficile lorsque les endroits où ils peuvent ramasser du bois sont restreins.

La salle de bains, petite et froide, se résume à un tuyau et à un trou dans le sol. Tout autour sont posés des seaux que la famille utilise pour se laver, faire la lessive et stocker de l’eau. Rabia raconte que les murs fins et les fenêtres fissurées signifient que « quelle que soit l’intensité du vent à l’extérieur, il pénètre à l’intérieur ». Malheureusement, elle ne peut rien y faire. Tout revenu qu’elle reçoit est destiné aux besoins de première nécessité comme la nourriture. A Kukes, où le taux de chômage avoisine le chiffre stupéfiant de 80%, ce n’est pas surprenant que ni Rabia ni son mari n’arrivent à trouver un emploi stable, mais sans aide de l’Etat, chaque jour devient une lutte pour survivre. Cette situation est aggravée en hiver lorsque se réchauffer représente un poste de dépenses supplémentaire que Rabia ne peut pas se permettre.
En dépit de son dénuement, Rabia est une hôtesse bienveillante. Elle ne cesse d’insister à nous préparer du thé avant que nous partions. Son plus jeune fils, à peine âgé de deux ans, n’a pas arrêté de pleurer tout le temps de notre visite. Je lui demande ce qu’il a et Rabia me réponds que l’humidité des murs le rend malade. Je lui avoue que je n’imagine pas à quel point cela doit être difficile de s’occuper d’enfants dans de telles conditions. La réponse de Rabia est simple, « Nous élevons ces enfants avec des sacrifices ».

L’image de pauvreté et d’adversité n’est pas celle que nous assimilons à l’Europe, mais pour beaucoup de familles en Albanie, c’est une réalité. Certes, ce n’est pas l’Europe que nous connaissons, mais elle existe et nous avons besoin de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour aider nos voisins en difficulté. Le colis alimentaire que nous avons distribué à Rabia subviendra aux besoins de la famille pour un mois et les couvertures vont aider à les protéger du froid et de la neige qui s’infiltrent chaque année dans leur foyer. Et pour ceux dans une réelle nécessité, même ces petites actions ont beaucoup d’importance. « Nous sommes des personnes dans le besoin » dit Rabia, « et c’est la seule aide que nous recevrons cet hiver. Nous remercions Allah et nous remercions les donateurs de Muslim Hands pour s’être souvenus de nous lorsque personne d’autre ne l’a fait ».


Muslim Hands France

Etablie en 2007, Muslim Hands France est une ONG de solidarité internationale régie par la loi 1901 et œuvrant dans le domaine de l’humanitaire et du développement.